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25.05.10 : Les secrets que cachent la victoire en Coupe de Suisse

Swisshockey: Que signifie pour le Servette HC la victoire en Coupe de Suisse le 16 mai 2010 ?
Nicolas Gisin: Beaucoup !! Il y a 20 ans, le Servette HC était un club presque mort : pas de juniors, pas de comité, une seule équipe dans la ligue la plus inférieure. Avec mon épouse Mireille et une amie, Sandra Bourquin, nous avons reconstruit le club, avec nos jeunes enfants et leurs amis. Nous ne voulions pas seulement créer une équipe, mais bien tout un club. La victoire en coupe n’est que la pointe émergeante d’un grand succès. Ainsi, Servette a déjà gagné cette année cinq titres chez les juniors. Ces victoires des jeunes sont aussi des premiers succès et pour moi de la même importance que la victoire en Coupe de Suisse.
Swisshockey: Ce succès est-il le simple résultat d’un coup de chance ?
Nicolas Gisin: Je pense que cette réussite s’est réalisée grâce au travail des joueurs, du coach et de toutes les personnes du club. L’an dernier Servette a perdu de justesse en finale, cette année gagné de justesse. Cela fait partie du jeu !!
Swisshockey: Comment le Servette a-t-il réalisé cette renaissance ?
Nicolas Gisin: Avec beaucoup d’enthousiasme, avec beaucoup de patience. Il y a 20 ans plus personne ne voulait faire quelque chose. Les membres du club disaient : c’est fini. A cette époque, j’ai dit aux quelques joueurs restants : allez aux Black-Boys, mais aidez-nous dans les entraînements des juniors. C’est alors que de nombreux Servettiens ne voulaient même plus parler avec moi !! Mais voilà qu’est arrivé un nouveau Président, et, moi, j’ai pu me concentrer sur les juniors. Après 10 ans, nous avions de bonnes équipes de juniors. Et alors, j’ai pu me concentrer sur l’organisation du club : comité, argent et première équipe. Les joueurs devaient signer une « charte » : le club garantissait un bon entraînement et les joueurs donnaient du temps et de l’énergie au club. C’est ainsi que cela fonctionne encore aujourd’hui. Si c’était à refaire, je procéderais de la même manière aujourd’hui, simplement, j’engagerais un coach professionnel beaucoup plus tôt.
Swisshockey: Actuellement combien y a-t-il d’actifs au Servette ?
Nicolas Gisin: Environ 250 adultes sont actifs au sein du club (avec le succès, tous les anciens sont revenus !!). Parmi ceux-ci, 50 jouent plus ou moins souvent au hockey et nous comptons 130 juniors.
Swisshockey: Où se situe le hockey féminin à Genève ?
Nicolas Gisin: Bientôt, il y aura deux équipes féminines à Genève !! Cette année, les jeunes filles du Servette sont fortes. Nos juniors C sont championnes suisses en salle et en plein air, mais malheureusement les autres clubs genevois n’ont pas de si jeunes joueuses. Nous travaillons pour corriger cela. En Suisse, il y a beaucoup de place pour le hockey féminin, car, en dehors du hockey, il n’y a quasiment pas de sports d’équipe en plein air pour les filles. Les clubs devraient réaliser cela. Ceci me rappelle l’histoire des marchands de chaussures envoyés en Afrique. L’un revient en disant : là-bas, il n’y a pas de débouchés, tout le monde marche à pieds nus. L’autre revient également et dit : là-bas, il y a un énorme débouché, les Africains marchent encore tous à pieds nus !!!
Swisshockey: Sans argent, un tel succès n’est pas possible. Servette dispose-t-il de sponsors généreux ?
Nicolas Gisin: Au début, il y a donc 20 ans, nous avons dû le faire de manière très modeste. Mais des parents nous disaient : « ce week-end mon enfant doit jouer au tennis (ou autre), car on a payé cher pour cela. ». Nous avons décidé de doubler nos cotisations !! Aucun enfant ne nous a quitté, mais le hockey leur est alors devenu une priorité. Aujourd’hui, Servette est un des clubs suisses de hockey les plus chers, mais aussi un de ceux qui offrent le plus. Je pense qu’en Suisse le hockey est beaucoup trop bon marché. Lorsque j’ai commencé avec le sponsoring, tous m’ont répondu : c’est impossible. Mais aujourd’hui, nous avons CHF 50’000.- de sponsoring par année. Presque chaque équipe a son propre sponsor. La banque Rothschild soutient notre première équipe depuis de nombreuses années. J’ai pu les convaincre grâce à notre « charte ».
Swisshockey: Quels sont vos prochains buts ?
Nicolas Gisin: Des structures professionnelles, un clubhouse, une salle et un deuxième terrain de hockey. Comme toujours, la plupart me répondront que c’est impossible !! Mais il n’y a que l’impossible qui est motivant !!!
Swisshockey: Que peut apprendre du Servette le hockey sur gazon en Suisse ?
Nicolas Gisin: Chaque club doit trouver sa propre voie. Il est important de comprendre que les limites ne sont que dans nos têtes !! Je suis convaincu qu’en Suisse, il y a un potentiel pour 10’000 joueurs de hockey sur gazon. En plein air, le hockey n’a aucune vraie concurrence – en football, il y a trop d’argent, en rugby trop de violence.
Interview: fem. 22.05.2010/Dr. Müller
Traduction en français : Pierre Bernhard